Robert Lowys est né à Paris, le 15 avril 1877. Son certificat de naissance montre que son père, Maurice Lowys, est négociant comme on désigne, à l’époque, les commerçants, installé boulevard Magenta. Sa mère, Rosalie Hecht, est aussi fille et nièce de négociant : son père tient un magasin rue du Château d’Eau et son oncle est installé rue d’Aboukir.
Issue d’une famille de commerçants juifs, Robert emprunte l’ascenseur social et fait son droit.
Licencié, il est inscrit au Tableau le 6 décembre 1907. Il a 30 ans. C’est tard. Qu’a t-il fait entre temps ?
Des annonces parues de 1899 à 1911, dans différents journaux, tels La Lanterne, Le Rappel, Le Figaro, Le Radical, montrent que Robert Lowys intervient régulièrement dans les Soirées Ouvrières de Montreuil-sous-Bois. Ancêtre des universités populaires, les Soirées Ouvrières de Montreuil ont été créées par des ouvriers soucieux d’accéder par eux-mêmes à l’éducation. Petit à petit, le cercle s’est élargi aux « producteurs intellectuels », tels Robert Lowys.
Celui-ci fait des conférences sur « La constitution de la république française de 1875 », «Le progrès social », « Les bienfaits de l’association », etc… . Les intellectuels qui participent à ces soirées ont été marqués par la facilité avec laquelle les masses populaires ont été manipulées lors de l’affaire Dreyfus et ils veulent contribuer, eux aussi, par l’éducation à sauver la République qui leur semble en péril. Robert Lowys, certainement dreyfusard, a fait partie des hussards laïcs, emprunts d’humanisme, souvent inspirés par des idées socialistes, qui se sont engagés, mais qui n’arrivent pas à combler le fossé qui existe entre ouvriers et intellectuels.
Il apparait comme l’un des premiers abonnés des Cahiers de la Quinzaine de Charles Péguy. En janvier 1900, les Soirées Ouvrières de Montreuil laissent place à une université populaire, inaugurée en présence d’Anatole France dans de nouveaux locaux. Robert continuera d’intervenir jusqu’en 1911.
La mobilisation d’août 1914 le trouve avocat à la Cour d’appel de Paris. Il a 37 ans et compte tenu de son âge, il est donc affecté à un régiment territorial. Ces régiments territoriaux regroupent des hommes encore capables de manier les armes, mais considérés comme trop âgés. On leur fait manier la pelle et la pioche. Surnommé les « pépères », ils ne sont pas censés participer aux opérations, mais les déboires de l’armée française vont les conduire à se trouver engagés dans des secteurs de combats.
Robert Lowys est affecté au 44ème Régiment Infanterie Territoriale, dont la devise est «Toujours gaiment, quoi qu’il arrive ». Dès le début de la guerre, son régiment est rattaché à la place forte de Verdun, 6ème région militaire. Il est chargé de travaux de terrassements, de fortifications et de garde des forts. Bras-sur-Meuse, Douaumont, Fleury, Mogeville, Naucourt, Gincrey, Morgemoulin, Foameix et Fromezy, tel est le terrain d’action du 44ème R.I.T.
Cependant, l’évolution du conflit et le rapprochement des lignes transforment la place considérée comme calme de Verdun en un lieu où les incursions allemandes et les pilonnages de l’artillerie teutonne engagent d’emblée, sur le champ de bataille, les troupes du 44ème R.I.T.
La fièvre typhoïde, fléau des armées en campagne, commence ses premiers ravages. Maladie des mains sales, de l’eau qui croupit dans les tranchées de boue et d’excréments, elle va atteindre 100.000 soldats et en tuer 15.000. Robert Lowys est de ceux-là.
Atteint par le virus lors d’une de ses missions, il est évacué vers l’hôpital des Glorieux à Verdun. Il décède le 29 octobre 1914. Quelques mois plus tard, le vaccin sera trouvé par des chercheurs français.
Robert Lowys, esprit généreux, avocat parisien, fils ou petit-fils d’émigrés juifs, est mort pour la France. Il fut inhumé en 1921 au cimetière du Père Lachaise.
Marie-Alice Jourde.