Avocats morts pour la France

1,68 m, yeux bleus, sourcils blonds, fils de Bâtonnier, Pierre Regnault est, selon sa citation, mort pour la France le 29 août 1914.

Fils du Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Nevers, Joseph Regnault, Pierre Regnault, né le 1er janvier 1877, effectue de brillantes études au lycée de Nevers : en 1894, il obtient une mention en histoire du droit au concours ; en 1895, en classe de philosophie, il est reçu au baccalauréat avec mention. Il est couronné cette même année de plusieurs prix dont le prix d’excellence et le prix du tableau d’honneur, et des premiers prix dans toutes les disciplines, excepté en allemand.

Il monte ensuite à Paris faire des études de droit. Licencié en 1897, avec une mention en droit romain, il effectue son service militaire au 13e régiment d’infanterie de Nevers, avant de s’inscrire au Barreau de Paris en 1899. Il suspend son stage de 1906 à 1908 pour travailler chez Me Vallet avoué, qui « n’a eu qu’à me féliciter à tous égards de sa collaboration » (lettre du 9 mars 1908).

En 1912, il est élu maire de la commune de Neuville-les Décize dans la Nièvre, à la suite de son père. « Tout lui souriait dans l’avenir » quand vint la guerre.

Il part de Mâcon avec le 334e régiment d’infanterie comme lieutenant de réserve, au 6e bataillon, commandant de la 1ère section sous les ordres du capitaine Charpiot. A la suite de sa conduite courageuse aux combats de Saales, il est proposé pour le grade de capitaine.

Le 29 août 1914, les éclaireurs du 334e arrivent au croisement des chemins de St Léonard–entre deux Eaux et Saulcy-Mandray : ils essuient une violente fusillade qui les oblige à se déployer contre les talus. Rejoint par deux autres compagnies, la dernière met « baïonnette au canon » et entraîne la première ligne. Mais « l’ennemi est invisible, son feu très nourri et très ajusté » et en quelques minutes, la charge est arrêtée après avoir subi de lourdes pertes. L’offensive continue : presque tous les officiers sont blessés et il y a plus de 30 soldats tués (JMO du 29 août 1914). C’est ainsi que le lieutenant Regnault perd la vie, à la tête de sa section, tué d’une balle au front, à 7 heures du matin.

Son camarade Max Neyrand, (blessé un peu plus tard), à ses côtés lors de sa mort, dira de lui qu’il est mort « en brave et n’a jamais tourné le dos au danger […] et notre admiration à tous » ; « il était si brave et si courageux » écrira son capitaine.

Quelques lettres écrites à sa famille témoignent de la gentillesse et de la bravoure de Pierre : « Nature franche et droite, caractère gai, plein d’entrain, d’une intelligence vive, le lieutenant Regnault avait surtout une haute conscience de ses devoirs » écrira le lieutenant-colonel Bourdon qui a combattu avec lui ; « pendant nos déplacements – poursuit-il – si durs au début, il s’occupait avec une sollicitude vraiment touchante du bien-être de ses hommes, vivant à côté d’eux, partageant leurs fatigues, leurs privations,, sans songer à lui-même, les encourageant de la paroles, les contenant de son exemple ». Le major Sanglé Ferrière : « si on plaint une mère d’avoir perdu un tel fils, on l’envie aussi d’avoir pu donner à son pays un tel défenseur ». Le conseil municipal de Neuville-les Décize saluera également son maire mais aussi l’homme qu’il était : « M. Pierre Regnault a donné sa vie sur le champ de bataille avec le même désintéressement, le même dévouement qui le caractérisaient dans sa trop courte carrière d’administrateur de la commune ».