C’est à Fleurier en Suisse dans le canton de Neuchâtel dans une famille protestante que le 4 août 1869 naît Charles, Frédéric Clément de son véritable nom Clément-Grandcourt. Il est le fils ainé, viennent ensuite Suzanne décédée en bas âge, puis Abel connu plus tard sous le nom de Général Abel Clément-Grandcourt et Jeanne. Les parents de Frédéric Clément qui habitent Paris, passent leurs vacances d’été à Fleurier, chez Fritz Berthoud le père adoptif de Madame Clément mère, née Lemoine-Bretel, que les petits enfants Clément considéraient comme leur grand-père. Fritz Berthoud, ancien banquier, érudit d’arts et d’histoire, est conseiller aux états puis conseiller national, député au grand conseil du canton de Neuchâtel, c’est lui qui initie dès son plus jeune âge, Frédéric Clément à l’étude des institutions politiques de la confédération helvétique et lui donne le goût et la passion de la liberté et du débat politique.
Charles Clément, son père, républicain sous l’Empire, allie ses convictions politiques à sa passion pour les Beaux-Arts exerçant les fonctions de critique d’art au Journal des Débats ; il est conservateur-adjoint au musée du Louvre. Frédéric Clément entre en troisième au Lycée Fontanes (devenu Lycée Condorcet), le 16 octobre 1882, il a tout juste treize ans. Il est un élève brillant et remarqué pour ses connaissances littéraires. En 1888, il est lauréat du Concours général de Français et bachelier ès lettres et ès sciences.
Cette même année, au printemps alors que la campagne boulangiste commençait à agiter le quartier latin, certains lycéens dont Frédéric Clément, sont dans la rue pour défendre le suffrage universel. Les parents de Frédéric Clément veulent voir leur fils entrer à l’Ecole normale, mais il s’inscrit à la Faculté de droit.
Frédéric Clément doit interrompre ses études de droit pendant l’année 1889-1890, pour accomplir son service militaire. Il en sort promu caporal, ce même grade avec lequel il s’engagera volontairement à 45 ans en septembre 1914.
Après avoir obtenu sa licence en droit, il s’inscrit au stage et devient avocat au Barreau de Paris, le 26 octobre 1892. Il demande la suspension de son stage pour une année afin de poursuive l’étude de la procédure civile à l’étude d’avoué de Maître Benoît et la procédure commerciale à l’étude de Maître Garbe. En 1887, il est élu deuxième secrétaire de la Conférence. Il choisit comme sujet de discours de la rentrée de la Conférence, l’éloge de Gambetta qu’il prononce le 19 novembre 1898. Lors de cette rentrée, le Prix Ernest Cartier décerné chaque année depuis sa création en 1895, à la demande du Bâtonnier Ernest Cartier, est remis à Frédéric Clément.
Sa carrière d’avocat démarre et il parcourt la France en se répandant sur des auditoires variés pour la Ligue des contribuables, l’Association nationale républicaine. Président de la Conférence Molé, il devient avocat de la légation suisse à Paris, et le directeur de La Gazette de Lausanne, Edouard Secretan qui va devenir son beau-père, lui confie la rubrique des « Lettres de Paris » où pendant 15 ans Frédéric Clément va rédiger de très nombreux articles.
Le 3 août 1899, il épouse à Lausanne, en Suisse, Mademoiselle Aline, Caroline, Clémence, Gabrielle Secretan dont il a deux fils, Michel Clément-Grancourt, né en 1900 qui deviendra avocat au Barreau de Paris, décédé en 1973, sans descendance et Olivier Clément-Grandcourt, né en 1903, décédé en 1982, qui eut deux fils nés de son mariage avec Charlotte Borel.
Parallèlement à ses activités d’avocat et de journaliste successivement à la République Française, au Journal des Débats, à l’Opinion, il fonde avec Eugène Motte, la Fédération Française dont il devient le secrétaire général en 1902 pour défendre ses idées libérales. Ses prises de positions sont clairement affirmées lorsqu’il envoie au procureur de la République de Versailles sa démission de suppléant de juge de paix du canton de Sèvres en 1903. Candidat à la députation de la Seine Inférieure (Le Havre) pour les républicains progressistes contre le député sortant Jules Siegfried à deux reprises en 1906 et 1910, il perd et reprend sa plume de journaliste pour défendre une nouvelle réforme électorale, celle de la représentation proportionnelle, sujet qu’il connaît de ses attaches suisses.
A l’heure de l’ordre de mobilisation générale, en août 1914, Frédéric Clément n’est pas appelé appartenant par son âge à la classe 1889 une des plus vieilles classes de la réserve. Il trépigne et les nouvelles du front l’inquiètent tant qu’il court au bureau de recrutement reprendre ses galons de caporal conquis lors de son service militaire et part le 4 septembre, à 45 ans, rejoindre le 46e Régiment d’Infanterie. La veille, il a écrit au Bâtonnier pour lui donner la liste de ses affaires en cours et lui demander de charger un confrère de les faire reporter « après la guerre » …
Au début du mois de février 1915, promu sergent, il rejoint à sa demande avec un détachement de renfort, son régiment en Argonne où il partage les périls de la guerre avec ses hommes. Le 28 février, il est envoyé avec sa section sur la colline du Vauquois sur une mission si périlleuse qu’aucun de ceux qui en étaient ne reviennent.
Le 28 février 1915, Frédéric Clément est porté disparu. Longtemps son épouse se refusa de se croire veuve.
Cindy Geraci / Aline Hamel-Martinet.
Citations et décorations :
- Cité à l’Ordre de l’Armée :
« Avocat à la Cour d’Appel de Paris, engagé volontaire à quarante-cinq ans dans un régiment d’Infanterie, n’a pas voulu accepter les galons d’officier avant d’avoir combattu dans le rang ; brave et beau soldat, a été mortellement atteint en entraînant ses hommes à l’assaut de Vauquois, le 28 février 1915. »
- Médaille militaire et Croix de guerre avec palme, à titre posthume, le 9 décembre 1919.