Après des études de droit et de sciences politiques, Roger Allier, fils d’un pasteur protestant, est admis au stage le 5 juillet 1910. Il passe son doctorat, se charge à plusieurs reprises de plaidoiries d’office, puis interrompt son stage pour cause de service militaire de 1911 à 1912 au 22e bataillon de chasseurs de Grenoble. De retour à Paris après son service militaire, il prépare le concours d’auditorat au Conseil d’Etat.
Lors de la mobilisation générale, il se trouve à Chamonix : il est chargé de constituer une section de mitrailleuse pour le 51e bataillon de chasseurs. Et il écrit à ses parents être surpris par «la rapidité avec laquelle tous les hommes ont répondu à l’appel », et poursuit même : «Nous avons trop d’hommes : la mobilisation complète nous donne un effectif de 350 par compagnie » !
Souffrant d’une entorse la veille du départ, il tait cette information de peur de rester à l'arrière. Il part donc mi-août de Aime en Savoie, non sans avoir quelques jours auparavant supplié le Commandant de « nous appeler dans l’est », avec le 51e bataillon de chasseurs, 74e division de réserve, section des mitrailleuses pour la région de Belfort Mulhouse. Après un périple en train de 50 heures, ils arrivent à Saint-Dié à 3 heures du matin, et essuient déjà des tirs de « taube » [avions] pendant qu’ils boivent leur café. Les combats et les bombardements de Saint-Dié commencent… Après deux jours de combats pour défendre le passage à niveau des Tiges, où certains l’ont cru mort, il est atteint au mollet gauche par une balle de mitrailleuse et se fracture le haut du fémur droit dans sa chute. Il sera amené à l’ambulance du collège sur une charrette attelée d’un bœuf par les allemands, et évacué le lendemain en direction de Saales. Il est déclaré mort le 30 août 1914. Sa cantine reviendra en octobre 1914 sans rien contenir. Il est cité à l’Ordre de l’Armée en 1915, mais son corps n’a toujours pas été retrouvé.
Le 19 mai 1916, le « comité lyonnais pour la recherche des disparus » a fait ouvrir, d’accord avec les autorités militaires et municipales, une grande tombe située derrière l’usine Marchal du faubourg de la Bolle (Saint-Dié). M. Jules Marchal, qui depuis 18 mois s’était dépensé, sans compter pour aider la famille Allier dans ses recherches se trouvait à Paris. Son corps est retrouvé dans cette tombe où les allemands déposaient les blessés qui succombaient à l’ambulance. Son autopsie révèlera des blessures aux jambes, un crâne fracassé «probablement par un coup de révolver tiré à bout portant » ; « les allemands ont tout fait pour que l’identification des corps soit impossible. Non seulement ils ont ôté la plaque des sous-lieutenants ; ils ont été jusqu’à couper et enlever la partie de son caleçon qui portait ses initiales. L’identification aurait été impossible sans les détails des vêtements que Mme Allier et moi-même étions les seuls à connaître » (Lettre au Bâtonnier de Raoul Allier, père, le 27 juillet 1916).
Cindy Geraci.
Citations et décorations:
- Ordre de citation de la VIIe armée n°12 du 14 mai 1915 :
« Quoique grièvement blessé aux deux jambes a continué à encourager ses chasseurs avec la plus remarquable énergie ».
- Croix de guerre - Chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume:
« Officier d'une réèlle valeur et d'un incomparable esprit de sacrifice. Chargé, le 28 août 1914, de défendre un point de passage important, s'est acquitté de sa mission d'une façon admirable, maintenant sa troupe jusqu'au dernier homme en dépit de blessures graves aux deux jambes. Tombé aux mains de l'ennemi, a été tué le 30 août 1914, victime de son dévouement et de sa mâle énergie. A été cité».