Henri Muel nait le 10 avril 1876 à Lille. Son père, Auguste Muel, a 40 ans et il est né à Bar-le-Duc, dans la Meuse. Il est inspecteur principal du Chemin de Fer du Nord et Chevalier de la Légion d’honneur. Sa mère, Lucy Greterin, est havraise et elle a 36 ans. Les deux époux demeurent Place de la Gare, sans doute un domicile de fonction qui explique la naissance d’Henri à Lille. Deux garçons sont déjà nés : Paul en 1862 et René en 1865. Marthe est née en 1868 et la plus jeune sœur d’Henri, Madeleine, verra le jour en 1879, elle aussi née à Lille. Fait-il toute sa scolarité à Lille ?
Lorsqu’il est appelé, en novembre 1897, pour faire son service militaire, il habite chez ses parents à Boulogne sur Mer. Il est affecté au 28ème régiment d’infanterie comme soldat de seconde classe. Il est mis en congé le 20 septembre 1898, au grade de caporal et un certificat de bonne conduite accordé, pour continuer ses études. Les étudiants n’effectuent qu’un an sous les drapeaux sous réserve de l’obtention ultérieure de diplômes.
Le 22 janvier 1903, Henri produit son diplôme de docteur en droit. Il est admis au serment le 27 juillet 1904. Son cabinet est installé 36 avenue Bugeaud, dans le 16ème arrondissement de Paris. Le 9 juin 1910, Henri écrit au bâtonnier pour lui faire part de sa décision à la suite d’un litige d’honoraires avec un client, le professeur Pierre Sebileau. Sa plume révèle les valeurs qui inspirent son exercice : « La science de l’avocat, l’éloquence, la probité ne sont pas une marchandise ; quand le malheur et la pauvreté les évoquent, elles se donnent libéralement : elles ne se vendent pas. C’est en m’inspirant de cette généreuse pensée que je « donne libéralement » au Docteur Sebileau le montant d’un labeur quotidien qu’il ne lui plait pas de reconnaitre. Faute de reconnaissance, il appréciera, j’en suis sûr, la « valeur » de mon geste».
Agé de 38 ans en août 1914, Henri est incorporé dans l’Armée territoriale, qui regroupe les hommes encore aptes à manier un fusil, à effectuer des travaux de garde, terrassement, tranchée, mais qui ne sont pas considérés comme assez jeunes et alertes pour être dans l’active. Il est affecté au 18ème Régiment d’Infanterie Territorial, qui a son casernement à Evreux. Le régiment est tout de suite dirigé vers Arras et Lens. Il est dans la Somme lorsqu’il participe à la retraite et s’arrête dans l’Oise. Fin septembre, il est en soutien dans plusieurs combats, dont celui de Flers, puis de la Ferme de Beauregard. C’est là qu’Henri est blessé une première fois. Des éclats d’obus atteignent sa main droite.
Le Journal de Marche et des opérations du 18ème RIT décrit jour après jour les travaux des compagnies. Les quelques lignes quotidiennes se terminent souvent par la mention d’un blessé ou d’un tué par éclats d’obus, par le tir d’une sentinelle ennemie ou par l’éboulement d’une tranchée sous l’effet d’un bombardement. Les hommes des RIT ne sont pas en première ligne, mais ils subissent des pertes très importantes.
En octobre, le régiment remonte dans l’Artois. A Puisieux, le 4 octobre, Henri est de nouveau blessé. Cette fois plus grièvement. Une déflagration l’a contusionné « tout le long des membres supérieurs et inférieurs droits » indique son registre militaire. Il refuse d’être évacué et malgré les objurgations de ses chefs, il poursuit son service. Toutefois, ses blessures sont si importantes et invalidantes qu’il est renvoyé à l’arrière le 6 novembre 1914. Menacé d’être amputé du bras droit, il doit subir 10 opérations, raconte un proche dans un courrier postérieur à son décès adressé au bâtonnier. Son registre militaire fait état des allers-retours qu’Henri va faire entre son service et l’hôpital n°9 d’Evreux.
Il séjourne à l’hôpital en septembre 1915, puis en février 1916, puis avril et juin 1916. La maladie de Bright a été diagnostiquée. Il est réformé par une décision de la Commission de réforme d’Evreux du 5 juillet 1916. Dès le lendemain, il est renvoyé dans ses foyers à Paris. Sa santé s’étiole et il s’éteint le 6 mai 1918 à Amilly, dans le Loiret.
Michèle Brault.
Citations et décorations :
- Cité à l’Ordre du Corps d’Armée :
- « Blessé et gravement contusionné à deux reprises différentes, a fait preuve d’une remarquable énergie en ne consentant pas à se laisser évacuer. »
- Lettre d’Henri Muel au bâtonnier du 9 juin 1910.
- Lettre d’Henri Muel au bâtonnier du 4 juin 1913.
- Notes biographiques du 4 juin 1918.
- Lettre de Madame Lucy Muel du 3 août 1919.
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Mémoire des hommes : pas de fiche
- Archives de Paris, D4R1889 : registre matricule