Avocats morts pour la France
Charles Rosset est né 6 rue Mogador, le 24 octobre 1872, chez ses parents, Paul et Caroline. Paul Rosset est associé d’agent de change et Caroline, née Ricketts, est sans profession. Les parents de Caroline, Carlo Ricketts et Elisa West, sont rentiers. Son père est-il apparenté à Joseph Rosset, lui aussi agent de change ? En tous cas, Charles Rosset est à l’abri du besoin.
René Idzkowski, avocat habitué des procès retentissants qui mourra déporté à Auschwitz en 1942, chargé de rédiger la notice sur son confrère Charles Rosset pour le Livre d’or du barreau de Paris, écrit qu’appartenant « à une famille de la grande bourgeoisie, sa fortune le rendit indépendant à sa majorité et ce n’est pas avec l’âpreté au gain que manifestent certains jeunes d’aujourd’hui qu’il arbora la robe. Il vint parmi nous parce qu’il avait discerné que c’est dans notre profession qu’il conserverait l’indépendance dont il était fier tout en cultivant la science du droit à laquelle il était passionnément attaché ».
En 1895, Charles débute sa carrière chez un avoué, Maître Allain, chez qui il passe trois ans. Il s’inscrit ensuite au stage le 26 octobre 1898. Il a tout juste 26 ans. Attiré par le droit international – les origines de sa mère y sont peut-être pour quelque chose, Charles Rosset devient le collaborateur de Maître Edouard Clunet, le fameux fondateur du Journal de Droit international privé et de législation comparée, qui prendra tout simplement son nom. Ce patron prestigieux le charge de suivre quotidiennement l’appel des causes et Charles Rosset se plait dans ce cabinet où il va rester de longues années.
Son devoir accompli le matin, il se consacre à ses dossiers d’assistance judiciaire. Par la suite, son beau-père, Monsieur Henri Donat, qui a épousé sa mère après le décès prématuré de son père, lui confiera des dossiers de La Prévoyance, la compagnie d’assurances qu’il dirige.
René Idzkowski raconte encore que Charles Rosset était un "hédoniste qui se livre aux sports tels que pêche, chasse et surtout automobile, qui écrit des chroniques « charmantes » et qui chante avec une belle voix de baryton qui ne laisse pas indifférent son auditoire féminin". L’ancêtre du Palais littéraire et musical, nommé La Crèmerie, n’organise pas un évènement sans que Charles Rosset en soit. D’un caractère affable, gai, il est renommé pour être apprécié de tous, même pendant la période difficile de l’affaire Dreyfus.
Sa photo révèle un visage rond, agréable, orné d’une moustache soignée, qui exprime sa bonhomie.
En mars 1905, il épouse Clotilde Piadé, avec qui il aura deux enfants, et s’installe dans le quartier de la Porte Dauphine. Sa carrière au barreau va connaitre un intermède car il se présente aux élections municipales en mai 1908 contre Ernest Gay, un Républicain modéré qui tient fermement le mandat du secteur de la Porte-Dauphine. Comme ses prédécesseurs, il échoue à déboulonner Gay et retourne auprès de Maître Clunet et de ses dossiers d’assurances.
Toutefois, sa santé est fragile. Il a accompli son service militaire dans les services auxiliaires alors qu’il aurait pu être réformé. A la mobilisation, il est réservé comme territorial auxiliaire et reste à l’arrière. Il a 41 ans. Cette situation protégée lui est insupportable. Il demande à servir et est affecté, au simple grade de soldat, au 40ème régiment d’infanterie territoriale. Les « territoriaux », appelés également les « pépères », sont des hommes qui ne sont pas aptes au service actif, jugés trop vieux ou en mauvaise santé tout en pouvant ou voulant servir. Les régiments d’infanterie territoriaux vont participer à la défense de places fortes, au ravitaillement des premières lignes, au terrassement et dans les différents services de l’Armée.
Charles Rosset est envoyé à Orléans pour apprendre le métier des armes. Sur place, il est pris d’une congestion pulmonaire qu’il dissimule pour ne pas rater le départ vers le front. Son état empire et s’aggrave à tel point qu’il est hospitalisé d’office par le médecin major. Il est trop tard. Charles Rosset décède 5 jours plus tard, le 8 avril 1915, sans avoir pu servir son pays, lui qui voulait tant donner à sa Patrie et qui y a laissé sa vie sans voir le front.
Michèle Brault
Citation et décoration :
- Pas de citation ni décoration identifiées à ce jour
- Portrait de Charles Hyppolyte Rosset
- Lettre de Madame Clotilde Rosset (19 avril 1915)
- Notice lue par M. René Idzkowski, Livre d’Or - Groupe des anciens Combattants du Palais - Tome 1 (1930)
- Mémoire des hommes : Charles Rosset
- Gallica : Nécrologie, Le Figaro, 14 avril 1915
- Wikipedia : Régiment d'Infanterie Territorial
Jean de Ramel est né le 29 octobre 1880 à Lormond, en Gironde. Il est le fils du Comte Fernand de Ramel, avocat près de la Cour de Cassation, qui, après s’être illustré dans la guerre de 1870, sera maire d’Alès, puis député du Gard en 1889, réélu sans discontinuité jusqu’en 1910.
Il vécut à Paris dans le 7ème arrondissement, il fit ses études au Collège Stanislas, puis, tout comme son frère puiné François, il poursuivit des études de droit. Licencié en droit le 27 octobre 1905, il prêtera serment le 22 novembre de la même année.
Inscrit au Tableau le 16 février 1907, à l’instar de son père, il poursuivra une carrière politique, il fut élu Conseiller Général du Gard.
Lieutenant de réserve, il est mobilisé dès août 1914 et versé au 329ème Régiment d’Infanterie. Au regard de ses états de service, en janvier 1915, il est nommé Porte-drapeau. C’est en cette qualité qu’il combattra vaillamment, au printemps 1915, à la bataille de Neuville-St-Vaast.
Les 25 et 26 septembre 1915, Jean de Ramel participe à l’offensive de Champagne, par deux fois, la hampe du drapeau qu’il tient dans les mains est brisée. Le 27 septembre 1915, au petit matin, tombe une pluie fine. Jean de Ramel, sous le feu de l’artillerie allemande, monte à l’assaut pour prendre la butte de Tahure, il tombera à 7 heures du matin, déchiqueté par un éclat d’obus. Quelques jours plus tard, lorsque l’on pourra enfin relever les morts, on constatera qu’il est couché sur son drapeau. La butte de Tahure sera reprise par les allemands quelques jours plus tard, en octobre 1915.
Jean de Ramel, cité à l’Ordre de l’Armée, reçu la Croix de Guerre avec palmes et fut fait Chevalier de la Légion d’Honneur. Son père, Fernand de Ramel, dans un premier temps, semble faire face à son immense chagrin, mais, trois mois plus tard, il décèdera subitement le 25 décembre 1915. Son frère, François, avocat à la Cour d’Appel de Paris, fut, tout comme lui, mobilisé en août 1914. Ayant eu plus de chance que son frère, François de Ramel survivra à ce conflit : Croix de Guerre, Chevalier de la Légion d’Honneur à titre militaire, il prendra part à la vie politique en étant élu, dès 1919 et ce, jusqu’en 1936, député du Gard, puis Conseiller Général.
En 1919, en mémoire de son fils, la comtesse de Ramel participera par un don à l'Ordre, à l'édification du Monument aux Morts du Palais de Justice.
Marie-Alice Jourde
Citations et décorations :
- Croix de guerre avec palmes. Cité à l'Ordre de l'Armée (21 octobre 1915) :
« A toujours donné l'exemple du plus grand sang-froid et du courage. Au cours d'un bombardement écrasant d'artillerie lourde, a été mortellement atteint à son poste de combat».
- Chevalier de la Légion d'honneur à titre posthume
- Portrait de Jean, Joseph, Régis, Henri de Ramel
- Image et texte de Souvenir
- Lettre de sa mère (1er juillet 1919)
- Notice lue par M. Jean Perrin, Livre d’Or - Groupe des anciens Combattants du Palais - Tome 1 (1930)
- Memoire des hommes : Jean de Ramel
- 329ri.canalblog.com : Le sous Lieutenant de Ramel, Porte-drapeau du 329e
- Archives départementales de Gironde, 1R 1157, Fiche matricule classe 1900 recrutement de Bordeaux, n°1495.