Avocats morts pour la France
 
        Louis Jules Fieffé est né le 12 octobre 1891 à Joigny dans l’Yonne. Son père, Paul Fieffé, alors âgé de 32 ans, y était Procureur de la République. Il avait épousé en 1890 Valentine Bourgoin.
Son grand père, dont il porte le prénom, Louis Fieffé, était limonadier à Paris.
Par la suite, sa famille s’installera au Chesnay ; mais on ne sait rien de son enfance, ni de sa scolarité ; il a au moins une sœur. C’est elle qui fournira à l’Ordre les renseignements demandés pour l’élaboration du Livre d’Or.
Louis est licencié en droit et licencié ès lettres. Ses études terminées, il renonce à son sursis pour accomplir son service militaire en octobre 1913. Initialement versé à la 20e section des secrétaires d’Etat-major, il passe en janvier 1916 au 16e RI et part dans la foulée à l’Ecole militaire de Saint Cyr. 
Il prête serment le 19 juillet 1916 probablement au cours d’une permission et après sa formation à l’Ecole militaire. Il est alors aspirant. Comme l’indique son père dans une lettre adressée au Bâtonnier, il plaidera en qualité d’avocat au conseil de guerre de la 25e division. Ce sera là sans doute le seul cadre où il exercera sa profession.
En avril 1917, le 16e RI se trouve dans la Somme, et occupe des tranchées à proximité de Saint Quentin et de la ligne Hindenburg. Le 13, il prend part à l'attaque de cette ligne, visant l'enlèvement de Saint-Quentin. « Précédé d'un barrage roulant, les Bataillons se lancent à l'assaut du saillant de Rocourt couvert par trois rangées de réseaux intacts qui occupent une profondeur d'une centaine de mètres ; ils pénètrent jusqu'à la troisième tranchée ennemie, mais éprouvés par de lourdes pertes, ayant épuisé leurs munitions, ils sont forcés de céder devant un ennemi très supérieur en nombre et contre-attaquant avec fureur. A la suite de cette opération, qui permit au commandement de se rendre compte de la solidité de la ligne Hindenburg, deux compagnies du régiment furent citées à l'Ordre de l'Armée : 1re et 11e . » (Historique du 16e RI).
C’est à l’occasion de cette attaque que l’aspirant Louis Fieffé, dont la bravoure et le sang-froid furent remarqués, fut cité à l’Ordre du Régiment et décoré de la Croix de guerre. Il y obtint ses galons de sous-lieutenant.
Fin juillet, le 16e RI est transporté vers le front de Verdun et s’installe près du bois d’Avocourt. Une grande offensive est prévue pour le 20 août. Elle doit permettre d’assoir solidement les positions françaises au nord de Verdun, de part et d’autre de la Meuse. C’est au cours de ces combats que Louis Fieffé fut blessé mortellement : « plaie pénétrante par balle ». Il décède à l’ambulance 6/13 de Ville sur Cousance le 22 août.
Il participa, par son engagement total aux côtés de ses hommes, à la réussite de l’action menée par son régiment. Son père écrira : « Vous pouvez être assuré, Monsieur le Bâtonnier, qu’il est mort à son poste faisant son devoir face à l’ennemi perpétuant ainsi la tradition de cette jeunesse héroïque qui se sacrifie pour nous sauver. Il était âgé de 25 ans».
Il sera décoré de la Légion d’honneur à titre posthume.
Frédérique Lubeigt.
Citations et décorations :
- Cité à l’Ordre du Régiment, du 22 avril 1917 :
 « Pendant la période du 11 au 15 avril 1917, s’est dépensé sans compter et a fait preuve des plus belles qualités de calme et de bravoure, maintenant sa section dans un ordre parfait, sous des bombardements très violents et dans des circonstances critiques. Officier d’élite et d’un moral élevé. »
 Croix de guerre, étoile de bronze, étoile de vermeil.
- Cité à l’Ordre de l’Armée :
 Le 20 août 1917, sous un violent tir d’artillerie s’est porté brillamment à l’assaut, atteignant avec sa section tous les objectifs et capturant de nombreux prisonniers. Est resté pendant tout le combat, jusqu’à ce qu’il fut blessé mortellement, un admirable exemple pour tous ses hommes. »
 Chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume.
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Portrait de Louis Fieffé 
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Lettre de son père Paul Fieffé au Bâtonnier (13 septembre 1917) 
- Mémoire des hommes : 
 Louis Jules Fieffé
 JMO 16e RI - 20 août 1917
- Tableaudhonneur.free.fr : Historique du 16e Régiment d'Infanterie (p.29)
- Archives départementales des Yvelines :
 Registres matricules, 1R / RM 452 : Louis Jules Fiéffé
 Transcription du décès 4E / 5957 : Louis Fieffé
- Archives départementales de l’Yonne : Acte de naissance de Louis Fieffé
- Memorialgenweb : Louis Fieffé
- Gallica 
 Nécrologie : Le Figaro, 4 novembre 1917
 St Quentin – Cambrai. La ligne Hindenburg, Guide Michelin des champs de bataille 1914-1918, 1921
 
        Emile Frank est né le 24 avril 1882 à Marseille. Son père, François Frank, libraire, et sa mère Rose Mandel, étaient d’origine hongroise et furent rapidement naturalisés. Il a une sœur ainée, Bella, également née en France.
On ne sait pas à quelle époque la famille Frank s’installe à Paris ni pourquoi. Mais assez tôt pour que qu’Emile y fasse ses études au Lycée Charlemagne.
Licencié en droit, licencié ès lettres, il est inscrit au Tableau le 23 novembre 1905. Il vit dans sa famille au 124 avenue Daumesnil dans le 12e arrondissement. Affilié au parti radical socialiste, il en sera un membre actif dans cet arrondissement, notamment pour les élections municipales de 1912.
Pendant la guerre, il épousera Marcelle Drey en octobre 1915 ; son beau-père, Adolphe Drey est médecin à Lyon.
On ignore quel fut son parcours pendant la guerre. Appartenant à la classe 1902, donc réserviste, il fut mobilisé dès août 1914 et vraisemblablement envoyé aux armées dans les semaines qui suivirent, tant les pertes furent importantes.
On le retrouve en septembre 1917 au 142e RI, qui après un repos bien mérité, s’installe dans la zone de Bezonvaux, à quelques kilomètres au Nord-Est de Verdun.
C’est un « secteur difficile, dangereux et délicat », adossé à un ravin, le Fonds des Rousses. On ne peut le franchir que par une passerelle étroite et branlante ; s’en écarter c’est l’enlisement dans la boue, la mort lente et terrible. » C’est une lutte d’artillerie incessante, canonnades et pilonnages d’obus. « De tous côtés, ce ne sont qu’éclatements, nuages de fumée noire, vapeurs toxiques empoisonnant l’atmosphère ! C’est l’enfer ! C’est Verdun ! ». (Historique 142e RI)
Tranchées et boyaux n’existent plus et ne forment plus « qu’une ligne de trous d’obus ». Pendant 25 jours et 25 nuits, c’est un bombardement perpétuel qu’endurent les bataillons. Ils ne cèderont pas. Le caporal Emile Frank est au cœur de cet enfer. Il sera tué d’une balle dans la poitrine en montant à l’assaut avec ses hommes, le 22 septembre à 15h. La mort fut instantanée.
C’est l’aumônier du régiment qui écrira à sa famille pour lui annoncer la triste nouvelle. Puis viendront les témoignages de ses camarades de combat car Emile Frank était très apprécié par ses hommes qui évoqueront sa bonté et son dévouement, son courage. Sa tombe fut retrouvée sur le champ de bataille et transférée au cimetière de Louvemont.
Agé de 35 ans, il décède en laissant sa jeune femme Marcelle, ainsi que sa mère, sa sœur et sa tante, dont il était le seul soutien, dans le plus grand dénuement.
Le conseil de l’Ordre, qui fut très présent aux côtés des familles de ses soldats, apporta son aide financière en allouant à partir d’octobre 1917 une rente mensuelle de 100 francs à Mme Emile Frank mère, transformée en secours annuel par décision du Conseil du 11 mai 1920.
Le Bâtonnier intervint également, avec Me César Campinchi, pour que sa tante, Thérèse Mandel, émigrée hongroise, arrivée en France 27 ans plus tôt, put obtenir un permis de séjour et cesser de vivre en recluse dans une France en guerre avec l’empire austro-hongrois.
Frédérique Lubeigt.
Citations et décorations :
- Cité à l’Ordre N° 138 de la 163e Division, le 7 novembre 1917
 « Très bon caporal, très brave et très énergique. S’est fait remarquer maintes fois dans des circonstances difficiles, et notamment dans la période du 8 au 12 septembre 1917, devant Verdun. »
 « Tombé glorieusement à son poste le 12 septembre 1917. »
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Portrait d’Emile Frank 
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Lettre de Bella Frank au Bâtonnier (11 octobre 1917) 
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Lettre de Mme Frank mère au Bâtonnier (20 novembre 1917) 
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Fiche ODAP de demande de renseignements 
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Mémoire des Hommes : 
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Acte de décès – transcription - Archives état civil Paris 12e arrdt – 12 D 313 p.18 
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Gallica : Nécrologie : Le Figaro, 20 novembre 1917 Engagement politique dans son arrondt (12e) : Le Radical (journal du Parti radical), 24 mars 1912 
 
			    	





