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René, Georges Weill est né le 26 janvier 1908 à Montpellier, dans l’Hérault. Marcel apparait souvent comme troisième prénom, mais il ne figure pas sur son acte de naissance. C’est le prénom de son frère, Marcel Albert, né en 1900, à Montpellier comme lui. Et il n’y a pas de trait d’union entre ses deux prénoms. René fera le choix de les associer, mais ses proches – et même des clients – l’appelleront René.
Le grand-père paternel de René, Albert Weill, est né à Wattwiller, dans le Haut-Rhin. La guerre de 1870 est survenue, cataclysme qui a marqué durablement l’histoire de la famille, car l’Alsace et la Lorraine ont été annexées par les Allemands, provoquant l’émigration de la famille vers les Vosges et Epinal, territoires restés français.
Albert Weill, négociant en tissus ou marchand d’étoffes, a créé une fabrique de lingerie à Epinal. C’est dans cette ville que naissent ses enfants, dont Emile, le père de René. Emile va travailler avec son père dans la fabrique de lingeries. Il se marie, en 1899, avec Jeanne Esther Weiller, la fille d’un autre négociant en tissus de Saint-Dié-des-Vosges. Immédiatement, le couple s’installe à Montpellier, puisque leur premier enfant, Marcel, y nait l’année suivante. Marcel sera polytechnicien.
La famille, alsacienne, puis lorraine, et juive s’enracine rapidement dans le terreau de Montpellier avec bonheur. René sera toujours attaché à sa ville.
René est brillant. Sa scolarité à la Faculté de droit de Montpellier est récompensée par les premiers prix, qu’il rafle systématiquement en fin d’année. Il est Lauréat de la Faculté de droit de Montpellier, Lauréat du Grand Prix de la ville de Montpellier et Lauréat du concours général des facultés de droit.
Son professeur de droit civil, Monsieur Emile Bécqué, exprimera la déception des maîtres de René-Georges qui regrettaient « qu’il ne se tournât pas vers l’agrégation ». Il décrit aussi « ce superbe garçon, à la figure toujours souriante, aux yeux pétillants d’intelligence, qui avait toujours autour de lui un cercle d’amis, tant sa personnalité était attirante, semblant incarner la vie dans toute sa plénitude. »
Dès l’obtention de sa licence, le 10 juillet 1928, René s’inscrit au stage du barreau de Montpellier. Il prête serment le 17 juillet. Toutefois, ses obligations militaires lui imposent de suspendre son stage. Il est appelé « aux armées » en novembre 1928 et fait son service à Vincennes comme EOR (élève officier de réserve), puis est nommé sous-lieutenant à l’intendance de Versailles. Il est libéré en octobre 1929.
Loin de reprendre son stage à Montpellier, il demande sa radiation et l’admission au stage du barreau de Paris, qui lui sera accordée le 10 octobre 1929. Il habite chez son frère Marcel, alors secrétaire adjoint des usines Citroën, qui demeure 53, avenue de la Grande Armée.
Le modèle de René, celui qui lui inspire respect et admiration, c’est Pierre Masse. Ancien député de l’Hérault, héros de la Grande Guerre, ancien sous-secrétaire d’Etat chargé de la justice militaire, il est un avocat reconnu et unanimement salué. Et il est membre du Conseil de l’Ordre depuis un an lorsque René s’inscrit au barreau de Paris.
Comme son modèle, René est originaire d’Alsace, et juif, même si ni l’un ni l’autre ne « pratique », comme lui, il vient de l’Hérault, comme lui, il croit en une France gardienne des libertés essentielles de l’homme. Et comme Pierre Masse, il est avocat.
Dès sa deuxième année de stage, René se présente au concours de la Conférence. Son discours lui vaut d’être élu à la prestigieuse 2ème place. René Bondoux, un autre grand homme du barreau de Paris, est 1erde la promotion. Jean-Louis Tixier-Vignancour est 9ème.
Il n’y a pas trace dans le dossier de l’Ordre du thème du discours qui lui vaut son élection. Mais s’y trouve un manuscrit de sa main qui traite, pour la conférence du 19 mars 1932, un sujet relatif à la propriété intellectuelle par l’affirmative, puis par la négative. Et il manifeste une maîtrise impressionnante de la langue française et un esprit cultivé, fin et plein d’humour. C’est tout simplement brillant.
Le 14 janvier 1933, dans la grande salle de la bibliothèque de l’Ordre, les deux premiers secrétaires prononcent, comme c’est l’usage, les discours d’ouverture de la Conférence. René Bondoux rend hommage à l’avocat Edgar Demange. René a choisi pour thème Gabriel Ouvrard, l’apprenti épicier devenu munitionnaire de la Révolution, du Directoire, du Consulat, puis banquier de l’Empire et dont les démêlés avec Napoléon ont passionné l’Europe et compromis le crédit de la France.
Son discours fait grande impression. Il est qualifié d’éblouissant et sera publié. Il est vrai que la culture et l’intelligence que révèle le portrait d’un ambitieux qui a su gagner la confiance des puissants en flattant leurs travers et leur égo pour obtenir des marchés « respectueux de la fortune privée et si prodigues de la fortune publique » illustrent les immenses qualités du jeune avocat.
Sa réputation naissante lui vaut d’intégrer, comme collaborateur, le cabinet de Raymond Rosenmark, avocat en droit des affaires. Rosenmark est alors très connu. Marqué à gauche, franc-maçon, il a été le conseiller juridique de l’ambassade d’URSS à Paris. Il représente également la Ligue des Droits de l’Homme. Son cabinet traite d’affaires importantes.
En 1935, René plaide aux côtés de son confrère Maurice Ribet, futur bâtonnier, dans l’affaire de l’Union charbonnière continentale. Il vient de finir son stage et d’être admis au grand Tableau.
Sa force de travail et son intelligence lui taillent rapidement une place de choix, non seulement au sein du cabinet de Raymond Rosenmark, mais au Palais. Il est connu pour savoir maîtriser les dossiers les plus difficiles et les plus complexes. Il est également considéré comme un intellectuel de haute volée, doté d’une grande conscience morale. Malgré une vie professionnelle envahissante, il trouve le temps d’aller au théâtre, dîner avec des amis dans un bon restaurant, aller au musée et lire. René se préserve. Il a des amis mais ne se lie pas facilement.
Raymond Rosenmark, dans une lettre au bâtonnier du 26 septembre 1945, décrit le collaborateur que René-Georges Weill fut :
« Ayant été le patron de René-Georges Weill presque de son entrée au Palais à la guerre de 1939, je veux dire quel collaborateur incomparable il a été. Il avait des connaissances étendues, un esprit largement ouvert, une curiosité de toutes les activités, en un mot une « large ouverture de compas », à quoi venaient s’ajouter des dons exceptionnels, une puissance de travail qui apparaissait inépuisable. Il avait toutes les qualités du « fort en thème » et tous les charmes du dilettante. Il aimait la vie et tous les agréments qu’elle pouvait dispenser. »
En 1938, l’accord de Munich indigne et heurte René. Il adopte immédiatement une position belliciste : il ne faut rien lâcher à Hitler, quitte à risquer la guerre. On connait la célèbre phrase de Churchill. René n’est pas homme à choisir le déshonneur. René Bondoux, dans son discours hommage, rapporte que ses amis le découvrent, avec surprise et incrédulité, homme de guerre. Il ne pratique aucun sport et n’aime pas l’effort physique. Il a même accompli son service militaire dans l’intendance …
Mais le brillant intellectuel est un homme de convictions, prêt à se battre pour celles-ci. Il a l’amour de la France et des valeurs de la République chevillé au corps.
En 1939, il est mobilisé avec le grade de lieutenant d’administration du Service de l’intendance métropolitaine. Cela ne l’empêche pas de solliciter à de nombreuses reprises d’être affecté à une unité combattante sur le front. Il demande aussi à passer dans l’aviation. Sans succès : il est trop vieux. Il transforme alors son unité d’intendance en corps combattant. Il exhorte ses hommes, il les exalte. Lui, le pur intellectuel, devient un chef de guerre.
Il organise la résistance de certaines positions pour retarder l’avance ennemie. Cela lui vaut la Croix de guerre avec palme. Il s’en enorgueillit auprès de Raymond Rosenmark dans une lettre du 25 mai 1940 : « On me dit que je décroche la croix de guerre avec palme. J’en suis très fier. Je vis dans une atmosphère magnifique. Le redressement est prodigieux et les jeunes gonflés à bloc. Je voudrais vous communiquer ma certitude de la victoire. Je ne vis plus que dans cette pensée ».
Il se bat, il tient des positions avec ses hommes. Pensant peut-être que tous se battent comme lui, il croit en la victoire …
Légèrement blessé, il est évacué à son grand désespoir. Quand la défaite est annoncée. Il ne s’y résout pas. Il écrit à sa mère qu’il continuera la lutte jusqu’au bout en France, ou, s’il le faut, hors de France. Il anticipe déjà. L’appel du Général de Gaulle trouve un écho profond chez lui. Dès le 21 juin 1940, il embarque du port de Sète sur le Sainte-Bernadette, un bateau qui transporte des troupes tchèques et polonaises vers Londres. Pour lui, c’est le chemin de l’honneur. Il arrive à Londres le 10 août 1940, après un détour par Gibraltar.
Il s’engage aussitôt dans les Forces Françaises Libres sous le nom de René Georges. En août 1940, il semble qu’il soit envoyé à Dakar pour une mission de renseignement du 2ème bureau du corps expéditionnaire. De retour à Londres, il n’a de cesse de rejoindre une unité combattante.
Quant René passe-t-il par Montpellier ? Son ami, Eugène Causse, imprimeur, raconte une rencontre inattendue au début de la guerre. René est vêtu en soldat.
« Je vis un équipement et des armes. Un gros pistolet sur un guéridon. Je devinais la présence du soldat à la réalité effrayante de ces objets. J’embrassais René-Georges en pleurant. Les quelques paroles qu’il me dit alors dans son émotion de Français, de soldat et d’ami ont été tout mon viatique pour passer ces temps terribles. Il était fort et puissant de certitudes. À ces quelques mots, je compris qu’il fulgurait de prescience, il était toute intelligence et logique. Ma raison trouvait l’aliment qu’elle cherchait, j’acceptais sa certitude qui devint la mienne et dont je ne me départis jamais. Nous avons longuement conversé au cours de la nuit. Sous une pluie battante, nous errions dans Montpellier. Je le voyais avec peine, le cœur étreint d’angoisse, me demander de l’accompagner dans tous les recoins de cette ville dont il paraissait vouloir emporter une image définitive. »
Celui qui va devenir le supérieur de René à Londres, le capitaine Georges Bergé, officier de carrière, s’est embarqué, lui, quelques jours avant René-Georges, dès la diffusion du message de défaite du maréchal Pétain, le 17 juin, sur le Sobieski, qui mouillait à Saint-Jean-de-Luz et il est arrivé à Londres le 21 juin 1940. Il s’est immédiatement présenté à De Gaulle et lui a proposé de créer une unité de parachutistes. Le 1er septembre 1940, il est nommé à la tête de la première Compagnie d’Infanterie de l’Air (1ère CIA) à laquelle René demande aussitôt à être intégré.
L’unité est formée par les Anglais à l’école de Ringway, près de Manchester. René apprend à sauter en parachute, lui qui est déjà plus que trentenaire et peu sportif. Sa volonté et son courage lui font surmonter tous les obstacles. René et les membres de l’unité sont tous brevetés parachutistes le 25 décembre 1940.
En janvier 1941, René, le « lieutenant Georges », remplace Bergé au commandement de la 1ère CIA. En effet, Georges Bergé et 10 des parachutistes de l’unité sont formés au sabotage dans une école spéciale près de Londres. René organise la formation parachutiste d’une deuxième section, qui est brevetée le 21 février 1941.
Le capitaine Bergé menant des missions en France, René reste à la tête de la 1ère Compagnie d’Infanterie de l’Air, qui est rebaptisée, en avril, 1ère Compagnie parachutiste de la France Libre.
L’effectif de la Compagnie se spécialise : une section est affectée à l’action clandestine et rattachée au BCRA (Bureau Central de renseignements et d’action), c’est-à-dire aux services secrets de la France libre, et deux autres se professionnalisent dans le parachutisme et embarquent pour le Moyen-Orient en juillet 1941. René, commandant un groupe d’une vingtaine d’hommes, est mis à la disposition des services de renseignement gaullistes et anglais.
En juillet, une petite lettre déposée à l’Ordre donne des nouvelles de René au bâtonnier Charpentier :
« Un parachutiste doit tout prévoir. Même la mort.
Je veux dire à mes confrères que je les remercie de la bienveillance qu’ils m’ont manifestée pendant dix années. (…)
Je suis fier de servir – comme capitaine parachutiste – dans l’armée du général de Gaulle. Je sais que De Gaulle sauvera le corps de la France, comme il a déjà sauvé son honneur. Je crois dans sa mission comme je crois dans la résurrection de la France.
Je demande à tous mes confrères de s’unir après la terrible épreuve. »
En septembre 1941, il est enfin désigné pour une mission en France. Malheureusement, il se blesse très gravement à l’entrainement, lors d’un saut : son parachute se déploie mal et il tombe lourdement. S’ensuit une longue convalescence qui le frustre profondément. Il veut agir. Il veut accomplir son devoir de soldat.
En novembre, il est nommé capitaine et on le mute au BCRA. En mars 1942, il est affecté à l’état-major particulier de De Gaulle. C’est peut-être une promotion, mais René ne s’en satisfait pas. Il veut être sur le terrain et réclame de participer à des missions.
Loin du Palais, René apprend qu’il est radié du Tableau par application de l’arrêt de la Cour de Paris du 12 février 1942, laquelle ne fait que mettre en œuvre le statut des juifs qui leur interdit l’accès au barreau. Raison de plus pour se battre contre l’Occupant qui le prive de sa robe, sa raison d’être, son armure pour défendre les libertés et l’opprimé.
Il a compris qu’il ne combattrait pas en uniforme sur un champ de bataille, que la guerre ne se porte pas encore sur ce terrain. Il lui faut rejoindre l’armée des ombres, ceux qui, dans l’anonymat et la solitude, risquent leur vie héroïquement en France.
Le colonel Passy, commandant du BCRA, refuse de lui donner une mission. Il écrira dans ses Mémoires, « Souvenirs », qu’une mauvaise intuition l’habitait :
« C’était un spécialiste confirmé, muni de tous les brevets britanniques et qui avait eu l’occasion de montrer au feu un magnifique courage. Il m’avait supplié, à plusieurs reprises, de l’envoyer en mission en France. J’avais toujours refusé, par suite d’une sorte d’intuition que partageait mon adjoint Manuel. Nous pensions en effet, sans pouvoir appuyer notre conviction sur aucune raison valable, qu’il lui arriverait malheur. »
René a-t-il appris l’arrestation de son frère ? Le 21 avril 1942, le quotidien l’Eclair relate l’arrestation de plusieurs militants communistes, dont Marcel Weill, ingénieur à Montpellier, et leur remise au Tribunal Militaire de la région.
Toujours est-il que le colonel Passy cherche un agent de liaison pour prendre contact avec les dirigeants FTP, la résistance communiste. René se prévaut tout de suite de l’appartenance politique de son frère et se propose pour la mission. Le colonel Passy accepte. Baptisée « Goldfish », la mission est d’importance : il s’agit de coordonner la résistance en France. Sous le pseudonyme de « Mec », René, qui est connu dorénavant comme le capitaine Georges, sera l’officier de liaison représentant la France Libre.
Dans la nuit du 28 au 29 mai 1942, il est parachuté dans l’Aisne avec deux opérateurs radio, dont son adjoint, André Montaut, dont le pseudonyme est « Mec W ». René est muni de faux papiers en bonne et due forme : il est François, Louis, Astruc, courtier en assurances. Sa carte d’identité le décrit cheveux châtains, moustache blonde, yeux marrons et d’une taille d’1, 78 m. Robert Delattre, « Bob », l’un des responsables du réseau du colonel Rémy, la « Confrérie Notre-Dame », les récupère. Ils prennent le train pour rejoindre Paris. René sera arrêté le soir-même.
Contrairement à ce qui a parfois été écrit, le réseau n’est pas infiltré. A la Gare du Nord, la valise neuve et luxueuse rapportée d’Angleterre par l’un des opérateurs radio attire l’attention d’un employé de l’Octroi qui ne tarde pas à découvrir l’un des postes émetteurs. L’employé appelle la police française qui en réfère, semble-t-il, immédiatement à la Gestapo. L’un des agents français fait discrètement signe au résistant arrêté de fuir. Celui-ci ne se le fait pas suggérer deux fois. Il s’échappe en emportant l’émetteur radio. Malheureusement, il a laissé son agenda dans la valise confisquée et y figure un rendez-vous sur la page du 29 mai à 19h : « Porte d’Auteuil. Jean-Luc ».
Dans la journée, René rend visite à des confrères, membres de la résistance judiciaire, pour leur demander l’hospitalité : Simone Penaud et Nelly et Roger Lamouche.
En fin de journée, la police (ou la Gestapo ?) tend ses filets Porte d’Auteuil, à l’angle du Boulevard Murat. A 18h45, Robert Delattre, « Bob », l’organisateur du rendez-vous arrive sur place. Alors qu’il attend « Jean-Luc », il a la surprise de se voir rejoint par René-Georges Weill, qu’il avait informé du rendez-vous en cas de besoin et qui a dû assister à l’arrestation de la Gare du Nord. Le piège se referme sur eux. René est empoigné. La police tire sur Robert Delattre qui tente de s’enfuir. Les deux hommes sont conduits dans une baraque de la Société des Transports Parisiens.
René n’a pas d’hésitation. Il sait le sort que les Allemands réservent aux résistants. C’est la torture dans tout ce qu’elle a de plus brutal et barbare. Le mal est sans limite. Se demande-t-il s’il saurait résister ? Il est plus que probable que la question ne se pose pas ainsi pour lui. La seule idée de risquer la vie de ses compagnons et de la résistance lui est intolérable. C’est une question de responsabilité. Et René-Georges Weill est un homme qui sait assumer les siennes.
Il avale sa capsule de cyanure.
Le rapport de police qui relate les faits, cité par René Bondoux, indique qu’au policier qui se précipite vers lui alors qu’il s’effondre, René-Georges Weill dit : « ce n’est pas la peine, je suis mort ». Puis il fait un signe de croix et crie « Vive De Gaulle ! Vivent les Anglais ! ».
Dans ses Mémoires, le colonel Rémy lui rend hommage :
« Ce brave entre les braves se méfiait de sa propre chair et ne voulait pas risquer de dévoiler sous la torture les secrets essentiels qui lui avaient été confiés. »
A 19 heures, « Jean-Luc » se présente au rendez-vous de la Porte d’Auteuil. L’action policière étant terminée, la souricière a été levée. « Jean-Luc », c’est le colonel Rémy, qui a créé le réseau « Confrérie Notre-Dame » et le réseau Centurie. Il n’est pas inquiété. Il écrira plus tard que René-Georges Weill lui a sauvé la vie en se donnant la mort.
Le capitaine Maurice Schumann, le futur ministre du général de Gaulle, ami de Georges-René Weill, témoigne du souvenir qu’il a laissé :
« Le capitaine René-Georges Weill est considéré par tous les Volontaires de la France combattante comme le type même des héros de la première heure. (…) Hélas, à peine parachuté sur la terre de France, il est capturé et il meurt pour la patrie en lançant un défi suprême à l’ennemi.
Il est impossible de prononcer le nom de René-Georges Weill devant n’importe lequel des rares survivants de la 1ère Compagnie de Parachutistes français sans que des larmes ne lui viennent immédiatement aux yeux.
J’ai remis moi-même au Général de Gaulle la lettre qu’il avait laissée à son intention en quittant l’Angleterre. Le Général n’a pas pu maîtriser son émotion. »
Personnalité rare, d’une intelligence hors du commun, curieux, rayonnant, apprécié de tous, admiré des hommes qu’il commandait et de ses pairs, René-Georges Weill a fait honneur à notre barreau, et à la France pour laquelle il s’est sacrifié.
Lors de l’hommage que l’Ordre rend à René-Georges Weill dans la grande salle de la bibliothèque, le 1er décembre 1945, Joë Nordmann, l’un des pionniers de la résistance judiciaire, s’adresse une dernière fois à René :
« Dans ta ville natale, nous t’avons fait des obsèques dignes de toi. Tu reposes, au milieu des pins, entre les collines et la mer. Sous ce ciel que tu nous avais si souvent décrit, pâle et lumineux comme un ciel de Grèce, nous t’avons suivi, dans la paix. Les hommes qui portaient la bière avaient l’accent de ton enfance. »
Et aux confrères présents :
« Mais sa mémoire, je puis l’attester, ne nous a jamais quitté.
Il était parmi nous dès le mois de juillet 1942 quand nous rédigions le premier numéro clandestin du Palais libre.
Il était parmi nous, le 11 novembre 1943, quand nous défilions salle des Pas Perdus devant la gerbe du Front national des juristes.
Il était parmi nous quand nous combattions au Ministère et au Palais pendant la semaine de l’insurrection. »
Le bâtonnier Marcel Poignard conclut :
« René-Georges Weill n’avait qu’une âme. Celle de l’avocat était celle du soldat. Toutes deux se confondaient, puisqu’elles s’étaient imposé la même mission : la défense de la liberté et de l’honneur. »
« Pensant à ceux qui nous ont ainsi quittés, nous sommes tentés de croire qu’ils ont manqué leur destinée.
Peut-être nous répondraient-ils, René-Georges Weill aurait certainement répondu, qu’ils ont du moins connu leur vocation, et que cela en soi seul peut suffire.
Ajoutons qu’ils demeurent notre justification et notre orgueil. »
Puisse René-Georges Weill demeurer longtemps dans la mémoire du Palais. Il est notre fierté.
 Michèle Brault.

Citation à l’ordre des Organes d’Armée de l’Intendance du 26 mai 1940 :

« Dans la nuit du 13 au 14 mai 1940, a contribué avec le commandant d’une compagnie d’infanterie à l’organisation d’une position ; s’est employé dans les journées suivantes à orienter des convois, se tenant dans les carrefours visés par l’aviation ennemie, donnant autour de lui un bel exemple de courage et de calme. »

Commandeur de la Légion d’honneur.

Compagnon de la Libération à titre posthume.

Croix de guerre 39-45 avec palme.

Médaille de la Résistance avec rosette.

Médaille des services militaires volontaires.

Mort pour la France.

Dossier administratif.

Lettre du cabinet du bâtonnier de Montpellier, 20 octobre 1929.

Lettre de René-Georges Weill au bâtonnier, juillet 1941.

Lettre d’Eugène Causse, 19 juin 1945.

Notice du capitaine Maurice Schumann, 18 septembre 1945.

Lettre de Raymond Rosenmark, 26 septembre 1945.

Notice du professeur Emile Becqué, 1945.

Discours du bâtonnier Marcel Poignard, 1er décembre 1945.

La Gazette du Palais, 5-7 décembre 1945.

Discours de René Bondoux, 12 mars 1959.

Services historiques de la Défense -Vincennes

René Georges Weill : GR28P4 230 14 et GR 16P295757

Mémoire des hommes

Généanet

René Georges Weill

Dictionnaire biographique du Maitron

René Georges Weill par Jean-Pierre Ravery 

Ordre de la Libération

René Georges Weill

Gallica-Retronews

Le Petit Méridional, 22 juillet 1931.

Le Grand écho du Nord de la France, 19 novembre 1931.

Le Journal des débats politiques et littéraires, 21 février 1935.

L’Eclair, 21 avril 1942.

La France libre : organe de "Ceux de la Libération-Vengeance", 2 décembre 1945.

L’Aurore, 2 décembre 1945.

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