En août 1914, lorsque la guerre débute, le Code de justice militaire de 1857, modifié en 1875, est en vigueur.
La justice militaire est totalement indépendante, entre les mains de l’Armée, et elle est conçue comme une justice disciplinaire.
En matière d’organisation, le Code prévoit, en temps de paix, un Tribunal Militaire Permanent par région militaire et un conseil de révision pour les recours et, en temps de guerre, une structure plus dense.
Dans ce dernier cas, la même organisation demeure, mais un Conseil de guerre est créé auprès de chaque unité de campagne : division, corps d’armée et Armée.
Ce Conseil de guerre est calqué sur le modèle des Tribunaux Militaires Permanents, mais les juges, choisis par le chef de l’unité parmi ses officiers, siègent à 5 au lieu de 7 en temps de paix. Un seul officier assure les fonctions de commissaire et rapporteur.
La procédure est simplifiée, l’accusé peut être traduit en 24 heures et sans instruction préalable devant le Conseil.
1914 : une sévérité accrue
Des mesures draconiennes sont prises en août et septembre 1914.
Deux décrets des 10 et 17 août 1914 suspendent la faculté de recours contre les décisions des Conseils de guerre et autorisent l’exécution immédiate des sentences de morts sans attendre l’avis du Président de la République, prévu dans le Code en vigueur.
Une circulaire du 1er septembre 1914 octroie néanmoins un droit de grâce à l’officier qui a « assuré la mise en jugement ».
Plus grave, un décret du 6 septembre 1914 instaure des Conseils de guerre spéciaux pour juger les « auteurs de crimes pris en flagrant délit ». Le Conseil spécial ne réunit que 3 juges, la procédure est réduite à sa plus simple expression et aucun recours n’est autorisé.
1916 : le retour aux principes
La sévérité et la quasi disparition des garanties procédurales ayant entrainé des abus, et pour certains graves, des parlementaires, mené par Paul Meunier, œuvrent à la réforme de la justice militaire. Paul Meunier est également avocat au Barreau de Paris et il se bat, pendant toute la guerre, pour les droits des soldats au combat.
Le 12 février 1916, une circulaire du Grand Quartier Général ordonne le recensement des militaires les plus aptes, par leur profession dans le civil ou par leur formation, à assurer la défense devant les Conseils de guerre.
Le 27 avril 1916, une loi, proposée par Paul Meunier, est promulguée, qui contient des réformes importantes :
- Les Conseils de guerre spéciaux sont supprimés,
- Les circonstances atténuantes peuvent être appliquées en toutes circonstances,
- Les peines peuvent être prononcées avec sursis.
Un décret du 8 juin 1916 rétablit le recours en révision pour les décisions de peine de mort.
L’usage du droit de grâce redevient la règle et l’exécution immédiate, l’exception.
Ces dispositions demeureront inchangées jusqu’à la fin de la guerre.
Une exception toutefois, un décret du 8 juin 1917, pris à la demande du général Pétain, exclura le droit de recours pour les soldats coupables de « rébellion, insubordination ».
Louis Turmel (1866-1919)
Après des études de droit, il devient avoué à Loudéac avant d’être avocat en 1896. Il est ensuite élu maire de Loudéac puis conseiller général avant d’être élu député des Côtes-du-Nord (Côtes d’Armor actuelles, en Bretagne).