Louis Malvy est né d’un père directeur de minoterie, maire et conseiller général, et d’une mère, Louise de Verninac, issue de la noblesse provinciale. Après des études de droit à Toulouse, il devient docteur avec une thèse concernant l’impôt sur le revenu, puis avocat. Il embrasse ensuite une carrière politique en devenant député en 1906, puis ministre de l’Intérieur de mars 1914 à août 1917.
Durant la guerre, il opte pour une attitude conciliatrice avec les pacifistes, les représentants syndicaux et la classe ouvrière, ce qui lui vaudra des ennemis parmi les bellicistes. Il décide de ne pas appliquer le Carnet B, instrument principal de surveillance des « suspects ».
Mais cette politique de désamorçage de la menace pacifiste par la négociation est, au fur et mesure que la guerre s’éternise, de plus en plus décriée. A partir de 1917, les attaques contre sa politique et sa personne, relayées par la presse, sont plus virulentes et le fragilisent. Pétain, nommé en mai 1917 commandant des armées sera un opposant virulent à Malvy, critiquant ouvertement ses choix, lui imputant les désordres du front et notamment la relation étroite qui lie les mutineries aux grèves agitant l’arrière. Il reprend également les critiques émises par Nivelle concernant le refus de la Direction de la Sureté générale de livrer au service de renseignement de l’armée des informations relatives aux mouvements antipatriotiques et anarchistes. Même si Malvy riposte, la défiance ne s’atténue pas et trouve son apogée dans l’intervention de Clémenceau au Sénat le 22 juillet 1917 : « Il faut rétablir l’ordre dans le pays », qui se lance alors dans un plaidoyer contre Malvy.
Sur le carnet B, il reproche à Malvy d’avoir préféré à l’opinion éclairée exprimée par lui dans l’Homme libre l’avis de ses « amis » du journal pacifiste Le Bonnet rouge. Il lui reproche notamment son amitié avec le directeur de publication de ce journal, Almereyda, et de lui avoir accordé un accès régulier au Ministère de l’Intérieur.
Malvy n’a pas d’autres choix que de démissionner du ministère le 31 août 1917 pour répondre librement aux calomnies dont il fait l’objet, tout en restant député. Les attaques se poursuivent, la presse réactionnaire, représentée par Léo Daudet, se déchaîne, l’accusant d’être un traitre à la patrie.
Il demande alors à être entendu par les Chambres, en vain. Il adresse alors une lettre à Raymond Poincaré, véritable réquisitoire où il reprend toutes les accusations dont l’ont incriminé Léon Daudet et l’Action française. Poincaré la transmet au président du Conseil Paul Painlevé qui demande des explications à Malvy.
Il sera déféré devant le Sénat réuni en Haute Cour de Justice et son procès débutera le 16 juillet 1918. Il est défendu par le bâtonnier Bourdillon.
Le 6 août 1918 la Haute Cour le déclare coupable « d’avoir dans l’exercice de ses fonctions de ministre de l’Intérieur de 1914 à 1917, méconnu, violé, trahi les intérêts de sa charge dans des conditions le constituant en état de forfaiture ». Il est condamné à cinq ans de bannissement.
Il s’exilera en Espagne avant de revenir en France en 1924 après avoir été amnistié. Il restera député du Lot jusqu’en 1940.